avec LE MONDE.fr
C’est une défaite en rase campagne : avant même de connaître la décision du juge des référés du Conseil d’État, attendu samedi 22 décembre à la mi-journée, l’administration pénitentiaire a engagé à la prison des Baumettes une lourde campagne de travaux, dont elle ne soupçonnait pas l’ampleur la semaine précédente.
Après l’émotion provoquée le 6 décembre par le rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté sur la prison marseillaise des Baumettes, l’Observatoire international des prisons (OIP) a réclamé des travaux urgents devant le Tribunal Administratif de Marseille. L’administration pénitentiaire n’a pas jugé utile de se déplacer jusqu’à l’audience, mais le juge des référés lui a imposé le 13 décembre d’enlever les ordures, de vérifier que chaque cellule « dispose d’un éclairage et d’une fenêtre » et d’arrêter de déposer les repas sur le sol, à la grande déception des rats et des cafards.
L’OIP ne s’était pas satisfait de ces demi-mesures, et a réclamé le 20 décembre de revoir les installations électriques dans une prison saturée d’humidité, de retirer des cellules « tout objet dangereux », notamment les morceaux de verre sur les fenêtres cassées, d’éradiquer les rats et de garantir un accès des détenus à l’eau potable.
40 PORTES, 1 000 AMPOULES ET PLUSIEURS TONNES DE MATÉRIEL
L’audience en référé a tourné à la déroute de l’administration. Une représentante du contrôleur des prisons a confirmé qu’un rat mort dans une coursive y était encore quinze jours plus tard et qu’un détenu en était réduit à puiser l’eau de ses toilettes. L’administration a juré que des travaux étaient lancés; le juge lui a accordé une demi-journée pour en apporter la preuve.
Les bons de commande sont arrivés par brassée vendredi : l’administration refait en urgence la plomberie, l’électricité et les peintures de 40 cellules, enrôle 36 détenus en « renfort hygiène » et embauche un peintre, deux électriciens, deux plombiers, un menuisier. Elle a acheté 40 portes, autant de fenêtres et de lavabos, 1 000 ampoules et plusieurs tonnes de matériel. « L’administration a enfin pris conscience de la nécessité d’intervenir en urgence, indique Me Patrice SPINOSI, l’avocat de l’OIP. Il est tout de même dommage qu’il ait fallu saisir deux fois le juge administratif pour obtenir les travaux réclamés par le contrôleur général ».
L’entreprise de dératisation a aussi été priée de mettre les bouchées doubles. « Je suis bien conscient que les délais sont extrêmement courts, lui a écrit l’administration pénitentiaire, mais c’est pour nous d’une importance capitale. »