Comme on s’en souvient, Jean-Jacques URVOAS nous avait reçus le lundi 13 mars dernier pour évoquer la création de bureaux de vote dans nos prisons.
Cette rencontre avait même donné lieu à un Communiqué Officiel du Ministère de la Justice
https://robindeslois.org/wp-content/uploads/2017/05/CommuniqueUrnesPrisons13mars2017.pdf
Le Ministre de la Justice se montrait très favorable à l’implantation de bureaux de vote temporaires dans les prisons, pour les divers scrutins à venir, comme cela existe dans de nombreux Pays
d’ EUROPE ou en EQUATEUR, par exemple. Sous prétexte de » réflexion », il préparait – comme souvent- un médiocre enterrement, par manque de courage politique. Nous comprenons mieux pourquoi Matthias FEKL , l’ex-Ministre de l’Intérieur, a fait semblant de vouloir nous recevoir pendant tout le mois d’avril … C’est , en effet, le Ministère de l’Intérieur qui a la main puisque c’est lui qui peut donner instruction aux Préfets de créer un Bureau de vote dans un Etablissement Pénitentiaire.
Nous avons, en effet, reçu un courrier daté du 5 mai , posté le .. mardi 9 mai et parvenu en Ecopli le vendredi 12 mai ! En voici le texte intégral. Chacun pourra se faire une opinion sur la sincérité de ce très décevant Ministre. Que l’expérimentation soit impossible sans nouveau cadre juridique, c’est d’accord et ce n’est pas ce que « nous » demandions, d’ailleurs. Mais prôner le vote par correspondance témoigne d’un étrange cynisme, d’autant pus étonnant que Jean-Jacques URVOAS connaît parfaitement bien les réalités carcérales.
https://robindeslois.org/wp-content/uploads/2017/05/Lettre-du-garde-des-Sceaux-du-2_05_2017.pdf
Et voici notre COMMUNIQUE
Depuis 2013, l’association ÔÇÿÔÇÿRobin des Lois » et son délégué général, François KORBER, militent activement pour que les personnes détenues qui ont conservé leurs droits civiques – soit environ 50 000 – puissent voter, comme cela se fait déjà dans de très nombreux autres Pays du monde.
Nous avons perdu trois ans, avec les atermoiements de Christiane TAUBIRA, se disant « hostile à toutes les discriminations » mais renvoyant la décision à d’obscures « réflexions interministérielles« . Pour 2016 – 2017, ÔÇÿÔÇÿRobin des Lois » a donc planifié une campagne méthodique en fédérant un certain nombre d’éminents spécialistes des questions pénales, du Droit Électoral et des Libertés Publiques. Jean-Christophe MÉNARD, avocat et docteur en droit, Sergio CORONADO, député EELV, le pénaliste Emmanuel LUDOT, Martine HERZOG-EVANS, Professeure de Droit Pénal et de l’exécution des peines, puis Frédéric THIRIEZ, avocat au Conseil d’État et à la Cour de Cassation ont apporté leur réflexion, leurs actions et leur soutien au fil des mois. Avec tous les signataires de la pétition nationale, les personnes qui ont relayé la campagne et un vif intérêt de la Presse pour cette importante question démocratique et civique, le débat est aujourd’hui public.
Il est clairement apparu que la question était simple. Comme le souligne Jean-René LECERF, ex-sénateur du NORD et Président du Conseil Départemental du NORD (LIBÉRATION, LA VOIX DU NORD) : » Au niveau de la loi, rien ne bloque. C’est une question de volonté politique. »
D’un point de vue ÔÇÿÔÇÿtechnique » il suffit d’un décret du Ministre de l’Intérieur invitant les Préfets à créer -, sur le fondement de l’article R.40 du Code électoral – un Bureau de vote et une liste électorale dans chacun des établissements pénitentiaires placés sous leur autorité. Quant au Ministre de la Justice , il lui suffit de prendre une circulaire expliquant aux chefs d’ Établissements pénitentiaires la marche à suivre : contact avec le maire, urne et isoloir, heures de vote, permis de communiquer à délivrer, etc.). Un projet de décret « clefs en main » est prêt a d’ailleurs été préparé par Frédéric THIRIEZ et proposé par ÔÇÿÔÇÿRobin des Lois ».
Après nous avoir courtoisement reçus le 13 mars 2017 et avoir annoncé par communiqué de presse son intention d’expérimenter l’installation d’un bureau de vote dans un établissement pénitentiaire, Jean-Jacques URVOAS est revenu sur sa parole en nous faisant savoir – la veille de son départ du ministère- qu’une expérimentation n’est juridiquement pas possible pour les prochaines Élections Législatives. Sollicité pendant tout le mois d’avril 2017, Matthias FEKL, le Ministre de l’Intérieur, a joué la montre afin de renvoyer la prise de décision sur ce point à son successeur.
Il aura fallu attendre le 12 mai 2017 pour que le Ministre de la Justice nous apprenne qu’il est ÔǪ urgent ÔǪ d’attendre, proposant, pour l’avenir, un vote par correspondance pour des personnes qui – dans leur grande majorité – ne savent pas ou peu écrire et sont, par nature, méfiantes quant aux respect des plis qu’ils remettent à des tiers.
Un vote par correspondance ne peut pas mieux fonctionner qu’un vote par procuration. Il ne permettrait pas la démarche de « pédagogie citoyenne » d’un vote en détention. Le vote des personnes détenues n’a pas pour seul vertu de les intéresser et faire participer à la vie politique : il représente un pas vers la communauté des citoyens. Seul un rituel symbolique fort tel que le fait de déposer son vote dans l’urne est à même d’incarner un tel pas.
Cette vertu civique sera à notre sens le principal apport de la mise en place du vote en détention. Créer un événement civique en prison ?! Á peu de frais, le symbole est fort et peut s’accompagner de toute une série d’événements carcéraux autour des échéances électorales. Á 25 ou 30 ans, de très nombreuses personnes détenues n’ont jamais voté de leur vie, exclues dès leur naissance dans des milieux défavorisés. Le vote en détention ne résoudra pas toutes les tares de notre système pénal et carcéral : manque de moyens dévolus à la prévention, misère et surpopulation carcérale, absence de véritables moyens dévolus à la réinsertion.
Mieux que tous les discours creux sur ÔÇÿÔÇÿles valeurs de la République » et ÔÇÿÔÇÿla lutte contre la radicalisation », cette réforme sera fortement réinsérante. Lorsqu’on commence à voter, on s’inscrit dans une toute autre logique que celle visant à poser des bombes ou à commettre des attentats ou, plus prosaïquement à planifier entre « collègues » comment seront réalisées ses prochaines infractions.
» Tout ce qui peut faire en sorte que les condamnés aient le sentiment, dans le cadre de leur peine, d’être considérés comme des citoyens à part entière est positif, pour leur réinsertion. La prison c’est avant tout l’opportunité que les gens se remettent dans le droit chemin, pour prévenir la récidive. » (Jean-René LECERF)
Il n’est évidemment pas question pour nous d’attendre 5 ans de plus. Beaucoup de temps, d’énergie et d’argent ont déjà été dépensés pour notre combat. La Gauche de gouvernement a montré – ici aussi – pendant 5 ans, son incapacité à réformer le Pays tout en prenant sérieusement en compte les questions de prévention de la délinquance, de détention, et d’aide à la réinsertion. La technostructure et les politiques professionnels, trop souvent éloignés du monde réel, nous opposent leur force d’inertie coutumière.
Des procédures sont en cours (T.A. de POITIERS ou saisine du Défenseur des Droits qui, pour l’instant, semble un peu assoupi sur ce dossier). Elles aboutiront, tôt ou tard, à la condamnation des divers ministres de l’Intérieur et de la Justice en poste depuis 2012 : alertés, ils avaient le pouvoir de mettre fin à une insupportable discrimination. Ils ne l’ont pas fait.
Le nouveau Président de la République a manifesté une claire volonté de mettre un terme aux blocages de notre Société. Nous allons le prendre au mot : dans les deux heures qui ont suivi leur nomination, le nouveau Garde des Sceaux et le nouveau Ministre de l’Intérieur ont reçu une demande d’audience pour leur expliquer le ÔÇÿÔÇÿproblème » et mesurer leur volonté de le résoudre. Tout en leur remettant un projet de décret et un projet de Circulaire rédigés par les meilleurs spécialistes de ces disciplines.
En cas de non-réponse sous huitaine ou de réponses dilatoires, Robin des Lois envisage de lancer un appel à toutes les personnes détenues et à leurs avocats pour déposer des centaines de demandes de mise en liberté provisoire et des centaines de demandes de permission de sortir pour aller voter aux deux tours des élections législatives. Les J.L.D. et les J.A.P. – seront, à l’évidence – submergés et nous leur présentons, à l’avance toutes nos excuses. Paralyser le Système est la seule manière démocratique et légale d’en démontrer l’absurdité, entretenue par tous les politiques depuis 15 ans.
http://www.leparisien.fr/politique/legislatives-il-n-y-aura-pas-de-bureaux-de-vote-dans-les-prisons-21-05-2017-6970050.php
http://www.liberation.fr/elections-presidentielle-legislatives-2017/2017/02/19/des-urnes-dans-les-prisons-la-france-peine-a-sauter-le-pas_1547759
http://www.lavoixdunord.fr/161840/article/2017-05-12/pourquoi-des-bureaux-de-vote-en-prison-seraient-necessaires